C’est sous un ciel lumineux que 53 sociétaires quittèrent Montbéliard, le 27 juin 2010, pour joindre Colmar. Après un voyage agréable, la matinée fut consacrée a la visite du musée Unterlinden, sous la direction de deux guides aussi vivantes et sympathiques que compétentes. Installé dans les bâtiments de l’ancien monastère des Dominicaines, construit au XIIIe siècle, ce musée a été fondé en 1853. Il réunit des œuvres provenant des églises de Colmar et de sa proche région, et a bénéficié de nombreuses donations faites par les riches familles de la ville. Incontestablement, le retable de Mathias Grünewald, réalisé vers 1500-1515 pour l’église du couvent des Antonins d’Issenheim et situé dans le chœur de la chapelle, constitue la pièce maîtresse du musée. L’ordre des Antonins était spécialisé dans le traitement du « mal des ardents » ou « feu de saint Antoine » (empoisonnement au seigle ergoté) et le retable était exposé dans l’église, ouvert de différentes façons selon les jours. Les statues du compartiment central n’étaient visibles qu’à la fête de saint Antoine. Le réalisme des détails, chargés d’une symbolique forte, le dispute à la poésie et à l’invention (ange aux plumes vertes) et même à l’humour des décors et des personnages (soldat renversé, son casque sur le nez). La virtuosité du maître excelle dans le remarquable traitement des mains. Dans la Crucifixion, partie centrale de l’œuvre, la douleur physique qui émane du corps raidi et déchiré d’égratignures ou des mains déformées, semble souligner le caractère de la détresse surhumaine du Crucifié. La prédelle présente une mise au tombeau d’une grande force dramatique.
Le musée, d’une grande richesse, présente aussi de très belles collections d’art rhénan : peintures et sculptures, bronzes, vitraux, ivoires et tapisseries datant de la fin du Moyen Age et de la Renaissance. Les primitifs rhénans sont représentés par Holbein l’Ancien, Cranach l’Ancien, Gaspard Isenmann et les gravures sur cuivre de Martin Schongauer. Les salles du premier étage sont réservées à l’histoire de Colmar et présentent de belles collections d’objets typiques du patrimoine alsacien : costumes, meubles, armes, étains, orfèvrerie, ferronnerie, porcelaines et faïences. Le sous-sol abrite les collections archéologiques, en particulier des fragments de la très belle mosaïque gallo-romaine de Bergheim (IIIe siècle) ainsi que des œuvres de peintres du XXe siècle : Renoir, Rouault, Braque, Picasso, de Staël, Poliakoff.
Le déjeuner, pris au restaurant Pfeffel, en plein cœur historique, fit l’unanimité, tant par sa qualité que par la rapidité du service. Il fit la part belle aux spécialités alsaciennes, avec bloc de foie gras de canard et sa gelée, onglet de veau à l’échalote et sa garniture, assiette de fromages et gourmandise de quetsches tiède accompagnée de sa glace au pain d’épices, le tout arrosé de vins d’Alsace.
L’après-midi fut consacrée à une promenade guidée et commentée dans le centre historique. Mentionnée dès 823, Colmar est une étape dans les déplacements des souverains carolingiens et devient une cité active et fière de son indépendance politique, malgré une pression de plus en plus forte des Habsbourg au XIVe siècle. Elle se dote d’une charte communale en 1354 et entre dans la Décapole alsacienne. Cette ligue urbaine avait pour objet de défendre le patrimoine des dix villes les plus dynamiques d’Alsace. Colmar renforce sa position grâce au soutien des villes alliées et garantit la paix à sa population pendant près de deux siècles. Annexée par Louis XIV en 1673, elle perd ses libertés de ville impériale et devient la résidence du Conseil souverain d’Alsace. Dès la fin du XIXe siècle, l’essor de l’industrie textile lui assure une réelle prospérité. Schongauer (1445-1491), Bartholdi (1834-1904) et Hansi (1873-1951) sont nés à Colmar. La promenade nous permet d’admirer le temple Saint-Matthieu, l’ancienne douane (Koifhus), la maison Pfister (1537), la maison Adolphe (1350), plus vieille maison de la ville, la collégiale Saint-Martin et la maison des Têtes. Elle se termine par un regard pittoresque sur le quartier des tanneurs, véritable petite Venise colmarienne. L’après-midi s’achève par la visite de l’église des Dominicains, remarquable vaisseau élancé aux longs piliers sans chapiteau avec de beaux vitraux des XIVe et XVe siècles et le célèbre tableau de Schongauer, la Vierge au buisson de roses (1473). Situé devant le chœur, il représente la Vierge et l’Enfant qui se détachent sur un fond d’or couvert de rosiers blancs et rouges, habité de toutes sortes d’oiseaux. Cette œuvre, remarquablement conservée, brille par la qualité de ses couleurs et la rare élégance de sa composition.
Après cette journée très riche, le retour se fit dans d’excellentes conditions. Nos très chaleureux remerciements vont à Denise Hugon, organisatrice fidèle, dévouée et efficace de nos sorties qui associent toujours convivialité, enrichissement culturel et bonne chère à la grande satisfaction des participants.